L'intuition : un court-circuit du cerveau plutôt qu'un 6e sens ?

"Je sais généralement quand quelqu’un a tort, ou raison, même si je ne suis pas capable d’expliquer pourquoi", ou encore "Pour ce qui est de savoir s’il faut faire confiance à quelqu’un, je peux d’habitude me fier à mes impressions viscérales" sont des affirmations extraites d’un test élaboré par des chercheurs du MIT. Il comporte 40 questions pour faire "l’inventaire rationnel-expérientiel" d’un individu, ou, autrement dit, le niveau d’habileté rationnelle et intuitive d’un individu.

L'intuition qu'est-ce que c'est ?

Si j’ai retenu ces deux questions, c’est bien parce que la plupart du temps j’ai très peu d’arguments construits alors que j’ai très vite un avis sur toute situation, comme si je jaugeais instantanément un contexte, une ambiance, un état d’âme ou un comportement habituel du clampin que je ne connais pas. Certains s’étonnent de cette capacité et me qualifient d’intuitive, alors que d’autres me feraient vite passer pour une écervelée.

Comment, dans notre monde bientôt limité à deux bits —oui/non— peut-on encore passer outre les carcans du binaire (qui ont le mérite de gommer le temps nécessaire à une pensée à la Descartes) pour en un éclair proposer une perception que bien souvent le temps confirme ?

Quel bonheur pour moi que de lire dans un magazine scientifique* que l’intuition existe ! Voilà un article que je vais apprendre par cœur pour répondre à mes détracteurs...

C'est quoi l'intuition ?

Voici ce que les neuroscientifiques en disent : d’abord, l’intuition n’est ni un instinct, qui est un comportement inné, ni un sentiment de déjà-vu lequel serait un dysfonctionnement du cerveau n’arrivant pas à retrouver un souvenir associé à une situation considérée comme familière.

L’intuition est qualifiée dans l’article comme :

• Un éclair de génie : cette idée qui sort tout à coup, impeccable et imparable, est surtout le fruit de longues cogitations sur un problème, de façon inconsciente. Le cerveau a travaillé sans que l’on ne s’en rende compte et la solution semble apparaître instantanée un beau matin.

• Un coup d’œil expert : ici, c’est le résultat de l’expérience dans un domaine précis qui fait qu’un diagnostic est vite posé. L’accumulation des données dans le cerveau permet de passer outre le raisonnement logique et long d’un débutant.

• Un pressentiment : là, ce sont les émotions qui gouvernent l’intuition. Les ressentis de notre "soi" poussent à prendre une décision en fonction des perceptions que l’on a déjà pu vivre à un autre moment. Ressurgissent alors des peurs ou des joies déjà connues.

L’intuition, une fonction cognitive comme une autre…

Ainsi, l’intuition est tout bonnement un process du cerveau. Alors que les rationnels réfléchissent et prennent du temps pour utiliser leurs savoirs, les intuitifs vont droit au but en se connectant sur leur mémoire qui englobe tout : savoirs, expérience, ressentis.

C’est ainsi une affaire de conscientisation pour les premiers qui analysent leurs données pour les présenter, alors que les seconds accèdent à leur inconscient qui "sait tout". Avouons que notre système d’apprentissage et le numérique à outrance, entre autres planifications, ont le risque d’amplifier l’entrainement du cerveau du côté rationnel.

Si l’on ne veut pas tous fonctionner un peu comme des machines, gardons à l’esprit que l’intuition existe en tant que donnée scientifique et qu’il n’y a pas à avoir honte d’être coite pour expliquer nos fulgurances. Et que je vous parlerai du 6e sens dans un autre épisode.

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*Science et Vie n° 1247 août 2021